Il est de plus en plus difficile d’être un groupe sur internet alors que ce devrait être le contraire. Une force rigide et indéfinissable réduit l’art à une question d’argent, et l’offre de musique indépendante dépasse largement la demande. Le marché est fatigué.
Médias et amateurs de musique bien intentionnés se sont retrouvés tellement inondés d’attrapes, de
et de groupes « nouveaux », « de l’heure », « séparés, mais réunis » ou carrément
que toute nouvelle voix tentant de se faire entendre est accueillie avec une plus grande méfiance qu’auparavant. Parmi les facteurs contribuant à cette fatigue, le principal est le temps. Une vie entière ne contient pas d’assez d’heures pour écouter tout ce qui est diffusé sur Soundcloud, regarder chaque vidéo, répondre à chaque courriel – ou les
.
Quand je dis que le marché est épuisé, je veux dire que le cynisme a écrasé l’appétit que nous avions pour la nouveauté. Puisque les blogues, les sites web et les compagnies de marketing/relations publiques peuvent utiliser internet pour présenter un paquet de nouveaux groupes avec le début d’une idée qui n’ont aucun charisme sur scène comme
(de plus en plus, moyennant un certain montant); il devient facile de se méfier de cette machine que nous avons construite et de perdre l’envie de partir en quête de ce qui est bon. Qui écoute de nouveaux artistes de nos jours? Alors que j’écris ces lignes, je suis dans un des quartiers les plus créatifs au monde, mais je m’endors au son de Rihanna qui déambule dans les rues. J’adore Rihanna – mais j’aime aussi découvrir les nouveaux artistes brillants qui travaillent dans l’ombre. Ou du moins, c’est ce que j’aime penser.
Une partie de mon propre cynisme vient du manque d’étiquette. Je suis éditrice de musique pour un site web de Toronto. Je travaille à temps plein, mais la musique représente (tout au plus) le dixième de mon travail. Pour chaque courriel demandant gentiment que je diffuse le nouveau vidéo de quelqu’un, il y en a un autre qui demande réparation pour avoir été écarté d’un article et une douzaine d’agents de relations publiques qui essayent pour la troisième fois de s’assurer un article de fond que notre site n’offre même pas. Je vois des artistes qui vont puiser des centaines ou des milliers de dollars de leurs poches en publicité, et je me demande : qui lit ces courriels? Qui les supprime? Qui les juge en silence?
L’épuisement par courriels n’est pas limité aux médias de la musique, mais les artistes doivent savoir qu’il existe, lui et le phénomène d’excès de contenu (je ne réutiliserai pas le mot contenu). Si l’on revient à la question d’argent : on parle de ressources – des ressources précieuses comme le temps, l’espace, l’énergie et, oui, l’argent. Toutes ces choses sont importantes pour vous puisqu’elles vous permettent de travailler. Vous avez vraisemblablement été frustrés par un rejet (réel ou perçu). Votre travail peut vous sembler une extension de vous-mêmes, et la séparation entre l’art et le personnel peut être difficile à faire, voire impossible. Quelques-uns des meilleurs artistes que je connais n’arrivent pas à faire cette séparation, et ils parviennent quand même à faire un travail merveilleux et à avoir du succès dans l’industrie. Mais pour construire des relations stables, savoir équilibrer ces sentiments avec ce qui est juste et pratique sur le moment est d’une aide indéniable.
J’ai noté des tendances en observant les réussites et les échecs dans ma boîte de réception, alors j’ai essayé d’en déduire des conseils (en tant que personne ayant été tant l’artiste frustrée que l’éditrice). Que vous soyez musicien ou simplement un agent cherchant des pistes, du plus petit artiste DIY aux plus gros rouages de la machine, il est crucial de considérer ce qui se passe de l’autre côté de vos messages.
Si vous n’êtes pas dans l’industrie pour encourager le bon travail, s’il vous plaît continuez d’envoyer des communiqués de presse louches dont le sujet commence par « Re : » suivi d’un lien vers Buzzfeed écrit tout en majuscules. Ce n’est pas très long de supprimer ces courriels. Par contre, si vous êtes un artiste qui a besoin de soutien pour son travail et que vous n’êtes pas certain de comment les médias vous perçoivent (je suis dans le domaine numérique, mais j’imagine que les grandes lignes s’appliquent à l’extérieur des blogues et des webzines), ou si vous travaillez en marketing et désirez mieux représenter vos clients, j’espère que ce guide saura vous être utile.
Que voulez-vous?
On devrait tous poser cette question plus souvent. C’est la clé avant d’entreprendre une campagne de courriels pour promouvoir votre travail. Quand c’est fait honnêtement, on peut être surpris de la réponse. Peut-être que vous voulez plus d’écoutes sur votre Soundcloud, ou plus de
fans sur Facebook pour pouvoir attirer l’attention d’un label ou d’un agent artistique. Peut-être que vous voulez que le plus de gens possible (de combien de personnes parle-t-on concrètement? Idéalement?) écoute votre chanson en ligne parce que c’est sur un sujet qui vous tient à cœur. Peut-être que vous voulez commencer à remplir de plus grandes salles locales pour impressionner de meilleurs promoteurs. Fixez-vous des objectifs (autant que vous voulez) plus petits que « Meilleure nouveauté musicale » ou contrat avec 4AD. Plus ils seront hyper spécifiques, plus il sera facile de trouver qui contacter et comment.
Qui contacter?
Élaborer une liste de contacts est une tâche en soi. Premièrement, il faut se demander : qui
connaissez-vous? Si un de vos amis écrit des critiques pour le journal universitaire, ce contact pourrait être beaucoup plus important que le nom d’un de vos rédacteurs préférés tiré du bloc-générique d’un de vos grands sites de musique préférés. Ce n’est pas qu’il ne faudrait pas contacter les deux, mais bien que vous soyez fier de votre travail : est-ce que c’est première chose que vous voulez présenter à un grand site web? Est-ce que ce média a déjà publié sur des groupes aussi petits que le vôtre, ou est-ce qu’ils écrivent uniquement sur ceux qui ont fait des tournées, qui ont des labels, ou qui ont un peu plus d’expérience? Et si vous faites quelque chose de mieux d’ici quelques mois? Il ne faut pas nécessairement commencer au bas de l’échelle, mais lorsqu’on commence, contacter un rédacteur local ou un petit blogue est plus susceptible de se conclure par une couverture médiatique.
Déterminez ce que vous faites et où vous vous situez dans le paysage médiatique. Qui couvre la musique émergente localement, régionalement? Où vont les groupes semblables au vôtre pour trouver un tremplin en ligne? Quels rédacteurs seraient plus à même de comprendre votre approche? Y a-t-il quelqu’un dans votre communauté qui peut vous fournir des contacts dans les médias?
Commencez à rédiger une liste de contacts organisée en fonction de leur niveau d’intérêt potentiel. Il devrait y en avoir au moins quelques-uns que vous seriez en mesure de contacter directement, en personne.
Éviter de raconter l’histoire de sa vie est une bonne chose, mais faire quelques remarques personnelles n’est pas une mauvaise idée non plus. Je réponds mieux aux courriels personnels (jusqu’à un certain point – j’y reviendrai plus loin). Envoyer chaque message séparément plutôt qu’un envoi massif fait en sorte qu’il risque plus d’attirer l’attention du rédacteur ou de la publication, et il y aura plus de chance qu’il pense que vous les contactez parce que vous savez ce qu’ils font (c’est mieux – et généralement évident – si c’est
réellement le cas). Le gros côté négatif ici est le temps : même envoyer un message identique avec quelques petites modifications des douzaines ou des centaines de fois est un investissement de temps considérable.
Un bon compromis est de choisir quelques sites ou rédacteurs à contacter individuellement, puis d’envoyer un message de groupe au reste. (Important : Si vous n’utilisez pas un site comme Mailchimp pour les envois massifs de courriels, rappelez-vous de placer tous les destinataires en CCI et d’adresser le message uniquement à vous-même.)
En plus d’attirer l’attention du destinataire,
un courriel personnel augmente les chances de pouvoir bâtir une relation avec les rédacteurs qui croient en votre travail – une stratégie qui fonctionne souvent mieux que l’envoi d’un courriel au hasard, à des centaines de sites ou de publications. Je n’ai pas de précisions sur combien de temps il faudrait le faire puisque c’est différent selon les situations – les personnalités et/ou les goûts se rencontrent quand ils se rencontrent. Soyez à l’affût et chérissez-les.
Ces relations vous seront profitables.
Il est important de garder à l’esprit que le fait de s’adresser au rédacteur personnellement ou de le connaitre ne garantit pas un article ni une réponse. Beaucoup d’agents de relations publiques ont le nom de centaines de rédacteurs et vont les contacter soit individuellement soit par une machine à spams. Répondre à chacun est impossible – et les raisons derrière le silence de votre ami dans l’équipe de musique de x.com peuvent être trop nombreuses pour que vous lui en vouliez. J’en reparlerai bientôt.
Quand les contacter?
Envoyez un courriel uniquement quand vous avez quelque chose à dire. Peut-être que ce sera juste « J’aimerais vous mettre au courant de ce que je fais » ou peut-être que ce sera très spécifique – « Je fais le lancement de mon album à tel endroit, tel moment ce mois-ci. »
Si, par exemple, votre nouveau vidéo n’est pas encore prêt, mais que vous voulez mousser l’intérêt,
choisissez qui vous voulez aviser. Essayez de cerner qui serait réellement intéressé à être avisé – ce sont généralement des sites qui ont déjà écrit sur vous auparavant. Ce genre de courriel ne doit être envoyé qu’une fois – un message voulant s’assurer que « et puis, allez-vous couvrir cette chose que vous n’avez jamais vue? » en demande trop. Vous enverrez un nouveau courriel lorsque le vidéo sera prêt à être partagé.
Vous pouvez aussi contacter des sites pour demander un premier article avant de lancer quelque chose (encore une fois, il faut être sélectif – s’ils n’ont encore jamais écrit sur vous, quelles sont les chances qu’ils veulent le faire pour votre nouveau vidéo/single/album?), mais c’est risqué. S’ils ne répondent pas, combien de temps êtes-vous prêt à attendre?
N’envoyez pas de communiqué de presse à une publication en lui demandant de partager une critique ou un article qui est paru dans un autre blogue. Je suis toujours surprise quand un artiste demande à des sites de partager une couverture faite par une autre publication. Du musicien indie fier de sa demi-page dans un hebdomadaire à l’agent annonçant qu’un mp3 de son client est sur un des blogues affiliés au
New York Times, si l’article dans lequel vous êtes mentionné est bon, il va être vu. De façon générale, misez sur votre travail, pas sur votre couverture médiatique. Les citations et les liens vers d’autres publications sont évidemment OK si elles sont incluses dans votre communiqué de presse.
Combien de messages faut-il envoyer?
Pas plus que deux pour un même sujet ou événement (« J’existe. », « J’organise un lancement pour mon premier album. », « J’aimerais partager un vidéo que j’ai produit. », etc.). Il peut y avoir un deuxième message après le courriel initial pour faire un suivi. Par la suite, si vous pensez que le message a été perdu, laissez les choses ainsi – la vérité, c’est que votre message n’a probablement pas été perdu. Il est vraisemblable que le destinataire ne pouvait simplement rien faire avec.
Peut-on contacter par Facebook?
Conservez les limites personnelles. Quand devriez-vous approcher les éditeurs ou les rédacteurs sur leur page personnelle pour votre groupe/album/festival? C’est différent selon les personnes, mais comme certaines peuvent être choquées ou mal à l’aise, la réponse est
jamais si l’ on parle de quelqu’un avec qui aucun message n’a encore été échangé – sauf si c’est le seul moyen de les contacter. Dans ce cas, écrivez-leur pour demander un courriel ou une autre façon de les joindre, pas pour présenter vos trucs.
Et pour Twitter?
Les « @ »
tweets de Twitter sont moins envahissants que les messages envoyés sur Facebook, mais encore une fois, demandez un courriel. La même chose s’applique pour les autres médias sociaux.
Comment parler de votre projet?
C’est simple :
soyez bref et direct. Un courriel original, ésotérique, personnel, exhaustif et/ou de longue haleine sur votre projet (que ce soit votre groupe/site web/nouveau single/café-restaurant/spectacle de lancement/etc.) peut sembler une bonne façon de se séparer du lot… ce ne l’est pas.
Rappelez-vous que vous communiquez avec quelqu’un qui croule déjà sous une montagne d’informations – même si ce n’est qu’un petit blogue. Quand vous mettez beaucoup d’effort sur un message qui ne va pas chercher le lecteur, vous en demandez beaucoup au destinataire. Peu importe votre talent ou l’importance que vous accordez à votre projet,
votre courriel demande de son temps, et vous devez démontrer que vous êtes reconnaissant de ce temps précieux qui vous êtes accordé.
Raconter l’histoire de votre vie fonctionne rarement lors d’une présentation à froid, et cela risque même de vous nuire. Souvenez-vous que votre message sera probablement survolé plutôt que lu. L’art et les idées abstraites devraient être dans votre art; vous envoyez un courriel pour obtenir du soutien, et en ce sens, soyez direct.
Essayez de présenter les choses comme si elles étaient pour être passées dans Google Translate (et c’est possible!). Les points sont-ils clairs? Pas besoin d’être un excellent rédacteur ou de maîtriser parfaitement la langue dans laquelle vous écrivez le courriel –
il faut seulement expliquer de façon claire et concise ce que vous faites et ce que vous voulez.
Conseils utiles pour le courriel
a) Même si vous devriez avoir des résultats spécifiques en tête, demander directement un soutien précis de la part du rédacteur ou de la publication peut lui imposer des attentes stressantes (rappelez-vous, vous écrivez à un être humain). Il faut savoir ce que vous voulez, mais en écrivant le message, il est préférable de ne pas formuler de demandes précises (
Donc, êtes-vous intéressé à faire une entrevue? Pouvez-vous diffuser la piste? Je peux me fier à vous pour la promo?). Optez plutôt pour des phrases plus cordiales :
J’aimerais vous aviser de…, j’adorerais prendre un moment pour en discuter davantage avec vous, j’espère que cela pourrait convenir un jour. Ce genre de langage respectueux démontre que vous êtes conscient des ressources du site. Cela vous ouvre également d’autres possibilités : si vous demandez qu’une piste soit mise en ligne et que ce n’est pas possible pour le destinataire, il se peut qu’il vous oublie. Mais si vous communiquez dans l’espoir d’une aide quelconque en fournissant le lien vers la piste, vous pourriez être inclus d’une autre façon.
Faites des demandes ouvertes.
b)
N’envoyez pas de pièces jointes, seulement des liens (vers des chansons/albums/vidéos/images/
one sheets/bios/etc.). Un courriel avec une pièce jointe a plus de chance de se retrouver dans le courrier indésirable, et même s’il arrive dans une boîte de réception, il a l’air d’un spam. En plus, la pièce jointe impose une demande supplémentaire à la personne qui la reçoit – qu’elle télécharge le contenu sur son ordinateur sans savoir de quoi il s’agit. Si cette demande ne semble pas énorme, ou si vous aimez l’idée de forcer quelqu’un à avoir une copie numérique de votre travail sur son disque dur, rappelez-vous que des centaines de courriels comme le vôtre font la même demande chaque semaine. Vous ne vous aidez pas en empirant le fouillis de quelqu’un – et je doute que beaucoup de blogueurs se donnent la peine de télécharger des contenus hasardeux.
c) Décrivez brièvement les liens pour éviter qu’ils paraissent aléatoires. « Pour voir le vidéo : [lien] », « Dossier de presse : [lien] », « Facebook : [lien] ».
d) Rappelez-vous que vous ne savez pas de quoi aura l’air le courriel de l’autre côté. Un message parfaitement formaté peut se retrouver en un paragraphe où tous les caractères spéciaux ont été convertis en chaines HTML indéchiffrables, raison de plus pour garder les choses simples et courtes.
e) N’écrivez pas en majuscules. Les gens à qui vous écrivez reçoivent des tas de courriels qui le sont, et ces messages ne sont pas considérés comme prioritaires – en fait, ils risquent surtout d’être vus comme des courriels indésirables ou du spam.
f) N’utilisez pas des phrases comme «
BUZZ BAND » ou «
HYPE SINGLE ». Si vous l’êtes ou en avez un (ou que c’est le cas de l’artiste que vous représentez), le rédacteur est déjà au courant. Autrement, l’affirmation est exagérée et parait absurde.
g) Même chose pour «
1 MILLION D’ÉCOUTES », «
VENDU EN 5 MINUTES », «
LE PLUS TÉLÉCHARGÉ CETTE SEMAINE » — si vous êtes si populaire, pourquoi le courriel à froid? Ça parait désespéré, et même si vous représentez un artiste connu, le destinataire va se demander ce qui se passe dans les coulisses; par exemple : «
Est-ce que les ventes de [tel artiste connu] sont mauvaises au point qu’il m’envoie un message avec ses stats de YouTube? »
h)
N’écrivez pas « Re : » dans le sujet de votre premier courriel pour qu’il ait l’air d’une conversation déjà entamée avec le destinataire. C’est clairement manipulateur, en plus d’inspirer du ressentiment plutôt que de l’intérêt. Certains n’arrivent pas à croire qu’une telle pratique existe, mais je le vois souvent – surtout par des mauvaises compagnies de relations publiques.
i)
Mettez toujours les destinataires en CCI. Ça mérite d’être répété. Si vous n’utilisez pas un site pour les envois massifs comme MailChimp, souvenez-vous de mettre toutes les adresses courriel en CCI et de n’adresser le message qu’à vous-même. Il suffit d’un blogueur distrait ou mécontent qui appuie sur « répondre à tous » pour commencer une chaine de spam longue et désastreuse. C’est quelque chose que j’ai souvent vu se produire, tant de la part du petit groupe indie que du gros festival. Et puis, vous ne voulez pas que tout le monde sache ceux à qui vous avez écrit.
j)
Dites d’où vous venez. Mon avis est biaisé puisque je travaille à temps plein pour un blogue de Toronto qui encourage la production locale, mais c’est une bonne règle à suivre, peu importe à qui vous écrivez (vous devriez aussi l’écrire sur votre profil en ligne). Cela peut paraitre plate ou bourgeois, mais votre profil/courriel n’est pas votre art ni une extension de votre travail en tant qu’artiste. Il communique ce que vous faites. Je comprends que vous pouvez vous définir comme artiste d’internet, et je sais à quoi ça peut ressembler d’être un artiste souvent sur la route, ou à différents endroits, ou d’avoir l’impression que votre art n’a rien à voir avec la ville d’où vous êtes. Mais je ne pourrai pas vous aider si vous dites être du Libéria et que je ne sais pas que vous êtes de Toronto.
Êtes-vous reconnaissant?
Se fâcher contre une publication qui ne garde pas à l’œil tout ce que vous faites
pourrait jouer contre vous – et vous épuiser. Il faut savoir que si vous n’êtes pas en communication directe avec eux, c’est souvent une question de chance si votre nouvel album finit par atterrir entre les mains des médias occupés. Peut-être que quelqu’un va lire quelque chose à propos de votre album sur les médias sociaux ou un autre site, et peut-être pas. Si vous êtes un petit label qui n’envoie jamais de communiqués de presse, comment pouvez-vous légitimement affirmer qu’on ne porte pas attention à vos artistes? C’est beaucoup demander que de s’attendre à ce que les rédacteurs viennent fréquemment consulter votre page. Et puis, est-ce que cette page a été mise à jour? Et les nouveaux albums, annoncés sur Facebook? J’aimerais que
plus d’artistes underground et de microlabels nous joignent activement, moi et les autres canaux à leur disposition.
Il est aussi important de comprendre que
ce n’est pas parce qu’un site a parlé de vous dans le passé qu’il vous doit quoi que ce soit dans le futur. Il y a des tas de raisons qui peuvent faire en sorte qu’un blogueur ayant publié quelque chose de positif sur votre dernier vidéo ne puisse pas vous aider pour le nouveau – dans l’optique où il peut vouloir ou devoir dépenser ses ressources limitées sur d’autres artistes plutôt que de les réserver pour une poignée de chanceux (c’est peut-être même une règle imposée par l’éditeur), leur colonne peut avoir été réduite (comme ma section locale hebdomadaire cet été); votre nouveau vidéo ne cadre peut-être pas avec le site alors que c’était le cas pour l’autre; peut-être qu’il n’aime pas ce nouveau vidéo;
peut-être qu’il est très occupé en ce moment (et c’est le principal) – etc. C’est une excellente idée de rester en contact avec les rédacteurs et les sites qui vous ont soutenu par le passé, mais ce serait une erreur de les attaquer s’ils ne réagissent pas à vos courriels. Il y a trop de variables à considérer pour que vous teniez leur couverture pour acquise.
Accuser vos contacts parce que vous vous sentez négligés va détruire la relation. Évitez aussi de harceler les sites qui n’ont pas mentionné votre projet dans un article. Il y a une façon de prendre cette exclusion et de la faire fonctionner à votre avantage : si vous voyez une liste ou un article qui aurait pu inclure votre travail, envoyez-leur un message bref et poli disant que vous avez apprécié l’article. Expliquez qui vous êtes et faites des liens vers ce que vous faites en disant que vous espérez qu’ils vous considéreront dans le futur.
Soyez positif, et la personne qui liera le message le recevra positivement. Quand on reçoit des cris du cœur d’artistes déçus de ne pas avoir été mentionnés dans un article, ça transmet toujours l’idée d’être redevable – et un message hostile ou culpabilisant ne jouera pas en votre faveur.
Restez professionnel : vous serez pris au sérieux et construirez peut-être même des ponts vers des endroits où un projet semblable au vôtre a déjà été accueilli.
De la même façon, ne demandez jamais qu’un article soit modifié pour vous inclure. C’est encore plus déplacé, surtout si vous suggérez d’enlever un autre artiste pour le remplacer. C’est le genre d’inconfort dont les rédacteurs et les éditeurs se souviennent.
Vous pouvez être réellement persuadé que votre nom irait mieux dans ce top 10 que [tel groupe inconnu/que vous trouvez mauvais], mais gardez cette opinion pour vous.
L’exception serait dans le cas où votre nom a été oublié dans le cadre d’un projet pour lequel vous avez du mérite, par exemple tous les membres du groupe – sauf vous – ont été nommés. J’y reviendrai.
Note : Évitez aussi de commenter des articles en disant qu’ils « ont manqué votre projet ». Aucun respect envers votre travail ne découlera de la lecture de ce commentaire par un média ou un fan potentiel, et ils s’en souviendront de façon négative. Vous pouvez par contre commenter en disant « voici mon projet » ou, encore mieux, en ajoutant quelque chose de positif à propos de l’article et en soulignant en quoi ça rejoint votre art (avec un hyperlien). Si vous ne trouvez rien de positif à dire sur l’article, vous ne voulez pas y être associé de toute façon.
Et s’ils se sont plantés?
Si une petite erreur a été commise (votre nom a été tout simplement oublié dans un article couvrant un événement que vous organisez), un bon éditeur ou rédacteur va modifier l’article ou se rattraper dans la mesure du possible après que vous ayez envoyé (poliment!) un message pour lui rappeler votre existence. S’ils ne le font pas, ils sont vraiment mauvais – ou ont juste oublié parce qu’ils sont trop occupés avec des choses plus urgentes. Lâchez prise après les avoir contactés une ou deux fois plutôt que de vous faire escalader au rang de chose urgente en les harcelant. C’est difficile et décevant, mais il y aura d’autres articles, et vous ne savez pas ce qui se passe dans les coulisses.
Si un article mentionne une information erronée sur vous, un événement ou un de vos projets, c’est certainement OK de demander une modification. Mais! Il y a une façon productive de le faire plutôt que tweeter en envoyant des insultes cathartiques à la publication. Rappelez-vous qu’il est possible que ce soit réellement une erreur. Dans ce cas, écrivez un message au rédacteur ou à la personne responsable, ou encore un
tweet avec les bonnes informations pour demander la correction. Ne faites pas d’exigence ou d’ultimatums –
donnez-leur vraiment la chance de régler le problème, et ils le feront généralement. Il est même possible que vous commenciez ainsi une relation durable plutôt que de sembler hostile. Si vous les contactez deux fois sans obtenir de réponse, vous pouvez toujours monter dans la pyramide (disons du responsable de la section au rédacteur en chef), essayer un autre média (par Twitter au lieu d’un courriel), ou (c’est difficile, je sais) lâcher prise. Si ça arrive plus d’une fois, peut-être que cette publication ne mérite pas votre temps.
Ça peut paraitre bizarre, mais à peu près la même règle s’applique si vous devez contacter une publication pour quelque chose d’offensant (plagiat, sexisme, homophobie ou diffamation).
Vous apprendrez beaucoup sur les personnes dirigeant les publications selon comment elles répondent à votre contact initial. Dans un tel cas, la publication devrait être en mesure de comprendre que vous soyez fâché – mais essayez de leur donner une chance. Vous pourriez vous retrouver avec un bon contact de plus et, peut-être plus important encore, vous pourriez faciliter le travail de l’éditeur plutôt que de lui ajouter des obstacles. Par contre, j’hésite un peu à conseiller le lâcher-prise ici si la publication s’est vraiment plantée. Ça dépend de la quantité d’énergie que vous voulez y mettre.
Devriez-vous payer pour un agent?
Peut-être. Je suis toujours pour les approches communautaires et à la DIY (faites du bon travail, et encouragez-le), mais j’ai vu les choses fonctionner de l’autre façon aussi.
Si vous pensez à payer pour un agent de relations publiques, vous devez savoir ce dans quoi vous vous embarquez. Les erreurs mentionnées plus haut ne sont souvent pas faites par les groupes, mais par les gens qu’ils payent pour les représenter. Il m’arrive de me demander si les groupes savent que leur agent dit qu’ils sont un « HYPE LOCAL BUZZ BAND » à des centaines, voire des milliers de médias.
Voici ce que vous devriez faire avant de payer des centaines de dollars pour une campagne de courriels. Une fois que vous savez exactement ce que vous voulez, cherchez à déterminer si vos buts sont réalistes (y a-t-il quelqu’un dans votre communauté qui pourrait vous donner une opinion pratique et éclairée? C’est un excellent moment pour utiliser les contacts que vous avez bâtis).
Demandez dans votre entourage pour des références et des cas vécus.
Magasinez et comparez les prix.
Trouvez un agent (ou une agence) qui vous donnera le temps dont vous avez besoin, la quantité de contrôle que vous souhaitez avoir et qui vous offrira des services concurrentiels. Dites-lui ce que vous voulez et comment (pas si) il peut vous le donner. Demandez qui fait partie de la liste de courriels et comment elle va être adaptée pour vous. Regardez qui est sur son bloc-générique et demandez à voir des campagnes sur lesquelles il a travaillé. Renseignez-vous sur la façon dont il gère les questions des publications sur vous et ce que vous faites. Allez voir ce qu’il fait sur les médias sociaux. Demandez des détails sur ses réussites passées. Demandez pourquoi il veut vous représenter. Cherchez à savoir s’il peut faire plus pour vous que du marketing sur internet.
Si vous ne vous sentez pas à l’aise, chercher à comprendre pourquoi – ou dites simplement non. En tant qu’artiste, vous pouvez (et vous devriez) être en contrôle. Si vous n’arrivez pas à trouver ce que vous cherchez, ce n’est peut-être pas le temps d’opter pour ce chemin.
Un agent de relations publiques peut vous faire économiser du temps et de l’énergie – mais les courriels pour lesquels il y a plus de chance que j’entreprenne des démarches sont toujours ceux qui proviennent directement du groupe ou du label. Cela varie par contre en fonction des publications – de façon générale, plus vous montez, moins les gens ont de temps pour les trucs personnels.
Épuisement par essai éducatif
Il faut lire ce texte, que ce soit avec cynisme ou bienveillance, comme provenant d’une rédactrice/éditrice qui essaye aussi de se faciliter la vie. Je ne suis pas satisfaite de l’état actuel de « l’arrière » des médias (aka là où se retrouvent vos courriels et vos communiqués de presse), et j’aurais aimé offrir de meilleurs conseils que d’apprendre quand il faut lâcher prise tout en restant positif et en investissant votre énergie au niveau communautaire et local. Je sais que, vous aussi, vous êtes fatigués et à court de ressources.
Ce que j’ai observé des deux côtés est un système surchargé et monté n’importe comment, mais qui doit être vu comme étant malléable et en mouvement. Il nous faut de nouvelles idées et de meilleurs systèmes de soutien que ceux que nous avons actuellement. Il est plus important de faciliter la vie des artistes que la mienne, et j’espère qu’il y a quelque chose ici qui pourra vous aider à le faire.
Kristel Jax dirige la section Art & Événements de blogTO.com, basé à Toronto, et fait des spectacles en tant que Brigitte Bardon’t. Elle est aussi sur Twitter: @AubreyJax.