From the drowned-out dronefields of Carol Fraser:
The only way to enter CKUT is through what feels like a back-door, even if it’s on the front of a building, which makes even a first-time visitor feel like they’re in on the magic of creating radio. Located on the ground and first floors of a residential building near McGill University’s campus, CKUT greets you with posters of events past and future, reminding you of your humble place in the great aural universe. With its two production studios and live Master Control Room, as well as offices for seven permanent staff, CKUT is an always buzzing hive, worker bees flying in and out in search of sweet sounding nectar to share with the rest of the world. Broadcasting since 1987 on 90.3 FM, and on a closed-circuit in the Shatner Building for twenty years before that, CKUT continues to push the envelope when it comes to music, news and arts and culture programming. [caption id="attachment_25049" align="aligncenter" width="700"]Par les champs de drones étouffés de Carol Fraser: (Traduit par Carol Fraser et Hлади́мир Вабо́ков)
La seule façon d’entrer dans CKUT est par une porte qui ressemble à une porte arrière, même si elle est en avant. Cela donne l’impression, même à la première visite, que l’on fait partie de l’équipe de magiciens qui crée la radio. CKUT occupe le rez-de-chaussée et le premier étage d’une maison près du campus de l’université McGill. À l’entrée, CKUT t’accueille avec des affiches qui annoncent des événements passés et à venir. Cela te rappelle que tu n’as qu’une petite place dans l’univers sonore. Les deux studios, la régie centrale et les bureaux des sept employés permanents transforment CKUT en ruche bourdonnante, où il y a toujours une abeille à la recherche de nectar sucré à faire écouter au reste du monde. En ondes sur 90.3 FM depuis 1987 et sur circuit fermé dans l’édifice Shatner vingt ans plus tôt, la programmation des volets musicaux, actualités et arts et culture de CKUT continue de se démarquer. Joni Sadler est la coordonnatrice du service musical à CKUT et elle est responsable de l’émission [New Shit] (Les nouveautés) (http://music.ckut.ca/tag/new-shit/) diffusée le lundi de 15 h à 17 h. CKUT est réputée pour être une station de radio qui fonctionne de façon collégiale et non hiérarchisée. Par conséquent, les services sont coordonnés et non dirigés. CF : Pourquoi CKUT est-elle une station de radio hors de l’ordinaire? JS : C’est un endroit qui essaye d’encourager l’expérimentation et l’innovation. La station a toujours eu un esprit d’aventure et d’exploration tant dans la façon d’animer que dans la façon d’utiliser la station comme un instrument. De toutes les stations avec lesquelles j’ai été impliquée, je pense que c’est celle qui est la plus ouverte à prendre des risques, non seulement sur le plan du contenu de la programmation, mais aussi de choses un peu folles – de ne pas toujours garder le statu quo et de prendre des risques de façon courageuse et géniale. Il y a des services vraiment solides : musical, arts et culture et actualités, ce que je n’ai pas vu souvent dans les stations que j’ai visitées ou avec lesquelles j’ai travaillé. Cette approche permet de faire évoluer chaque service. Notre service des nouvelles est sérieux et orienté vers la justice sociale, nous avons un caractère explicitement politique, dont nous sommes fiers. C’est aussi quelque chose qu’on tente d’encourager et de favoriser. CF : Comment décririez-vous la relation de CKUT avec Montréal et avec le reste du Canada? JS : CKUT est l’une des plus importantes stations de radio du Canada et est bien établie. Elle a une réputation solide, une histoire riche et profonde, et beaucoup d’élan et de passion. Je dirais que la station a toujours aimé sortir des sentiers battus. Le marathon [Homelesness Marathon] (Marathon des sans-abri)(http://ckut.ca/homeless/), est un bel exemple pour illustrer l’attitude de CKUT face aux risques qu’elle est prête à prendre et à ses positions. Que ça soit pour donner une voix aux gens marginalisés ou aux artistes. On essaye de donner un forum aux personnes marginalisées, ou aux artistes émergents qui n’ont pas d’autre vitrine pour leur musique. On essaye toujours d’être une ressource pour les gens en ondes ou en coulisses et aussi pour les artistes qui se découvrent. C’est vraiment important pour nous d’offrir des opportunités aux gens qui veulent se lancer et prendre des risques. Il y a beaucoup de respect et de collaboration entre les communautés musicales et CKUT. On aime donner vie aux projets de la communauté et on essaye de le faire de notre mieux. CF : Comment pensez-vous que CKUT soutient le même genre de musique et de culture que Weird Canada soutient? Pourquoi croyez-vous que c’est important? JS : CKUT a accueilli la conférence de l’Association nationale des radios étudiantes et communautaires (ANREC)(http://ncra.ca/) en 2009. Aaron Levin m’a approchée avec une feuille de papier qui disait « Je veux lancer un site Web. » [Rires] Il avait donné ces feuilles aux autres directeurs musicaux, et en fin de compte une demi-douzaine de nous sommes devenus des collaborateurs réguliers du site lorsqu’il a été lancé. Alors, les racines de Weird Canada sont dans CKUT, et dans la radio étudiante et communautaire en général. Dans mon esprit, les deux sont étroitement liés. On a travaillé en collaboration avec Weird Canada dans d’autres contextes. On a une émission qui s’appelle If You Got Ears lancée par des bénévoles de Weird Canada en 2014. Ils ont fait venir beaucoup d’invités et ils ont examiné plusieurs enjeux chers à Weird Canada : les aspects de la vie communautaire, les différentes parties de la création artistique et musicale sur scène. Dans un sens plus large, plusieurs de nos programmateurs aiment le site Web Weird Canada et l’utilisent pour puiser du contenu pour leurs propres émissions. Et à l’inverse, j’ai des amis qui trouve un disque dans notre discothèque, ou l’entendent pendant une émission et se disent : « Génial, je veux écrire un article à propos de ce disque pour Weird Canada. » Je pense que l’inspiration est mutuelle. Selon moi, en fin de compte, il s’agit de gens passionnés de musique et qui cherchent à appuyer des choses qui ne seraient pas entendues ailleurs, peu importe le média. CF : Qui, ou qu’est-ce qui vous a attiré vers CKUT? JS : C’est grâce à AJ [une ancienne coordinatrice du service musical à CKUT]. Avant, je travaillais à Ottawa et chaque fois que je visitais Montréal, on se rencontrait par hasard. Elle avait plus d’expérience que moi dans la communauté musicale et à ce titre. Elle m’a non seulement amenée à CKUT, mais m’a aussi donnée confiance en tant qu’artiste féminine et femme. Elle a été un modèle pour que j’apprenne à m’affirmer, à ne pas me laisser marcher dessus, à définir mes droits sur une scène et à être une chef de département compétente et respectée ici. Andy Williams est le coanimateur de The Goods qui célèbre son 13e anniversaire cette année. The Goods est diffusé le dimanche de 14 h à 16 h. « C’est une façon d’écouter de la musique qu’on n’entend pas souvent dans la culture populaire, et j’avais toujours été fascinée par ça. » CF : Est-ce qu’il y a eu un moment ou une personne en particulier qui vous a attiré vers CKUT? AW : Non, en fait… je me suis inscrit à McGill en 1994. Je suis arrivé en août et une des premières choses que j’ai faites après avoir défait mes bagages est d’aller à CKUT pour voir si je pouvais faire partie de l’équipe. Je connaissais des gens qui faisaient de la radio ici. Le monde de la radio est petit, étrangement, nous sommes tous reliés d’une façon ou d’une autre. Je voulais voir si je pouvais m’intégrer et s’il y avait une place pour moi. À cette époque, ils ne pouvaient pas vraiment se renseigner sur le Web pour voir si j’étais capable de le faire, mais en parlant avec eux, ils ont réalisé que « Oui, le gars s’y connaît probablement en jazz. » Alors, je me suis porté volontaire pour faire ma propre émission qui s’appelait « Solo for Two Voices with Dr. Moore » et est restée en ondes pendant environ cinq ans. Ensuite, je me suis joint à une équipe pour faire une émission qui s’appelle Jazz Euphorium qui existe encore, pour ensuite commencer The Goods avec Scott C. CF : Quel est le rôle de CKUT dans l’art que vous créez et celui que vous aimez? AW : La station m’a donné de la liberté! C’est assez facile pour moi de lancer mes albums, mais de les faire jouer en ondes, la station me permet de faire ça, ce qui est vraiment important (comme DJ). Et c’est ça qu’on fait, et c’est la raison pour laquelle notre émission s’appelle The Goods. On diffuse de la musique d’hier et d’aujourd’hui, et ce qu’on appelle « des classiques de demain. » CF : Pourquoi est-ce que les auditeurs écoutent CKUT? Pourquoi devraient-ils continuer à l’écouter? AW : Vous n’entendez pas toujours la même chose, j’entends toujours de la nouvelle musique à CKUT. La station montre la voie aux autres stations de radio. Je n’entends pas vraiment de la radio d’aussi bonne qualité ailleurs. Par exemple [Funky Revolutions] (http://ckut.ca/c/en/oldgrid/saturday,14 h), ils parlent de politique, de race, de genres, d’actualité. Ils feront jouer soit quelque chose qui concerne un de ces sujets, soit quelque chose relié à ce qui se passe dans l’actualité. Et selon moi, on a besoin de ça. Louis Burns, Coordinateur des ventes. Louis travaille à CKUT depuis plus de vingt ans. « Ma philosophie personnelle est “quittez l’école”. » CF : Pourquoi est-ce que CKUT est unique? LB : Grâce à son personnel. C’est ce que je peux considérer comme une vraie diversité, pas seulement la couleur de la peau, mais le bagage socioéconomique, les différents milieux socioculturels, les différentes habiletés, les aptitudes musicales qui sont vraiment proches de la vraie identité des gens, tu sais? Les préférences sexuelles, l’identité sexuelle, la gamme de 1 à 5 et tout ce qu’il y a entre les deux, les différentes religions, les différents âges…, mais il y a quelque chose de commun aussi, qui est un peu le concept d’une voie alternative, qui est ni le courant dominant ni un concours de popularité… les gens sont ici pour parler à quelqu’un d’autre. C’est une conversation intime et de la libre expression. CF : Quel est le rôle de CKUT à Montréal et au Canada? LB : C’est assurément une école en dehors du système scolaire…Je parlais à quelqu’un à propos du mouvement contre l’austérité auquel on assiste. On peut faire cette sensibilisation. Diffusez pendant différentes émissions de courtes séquences de cinq minutes sur l’austérité et avoir une conversation, un dialogue. C’est dans ce temps-là que pour moi, c’est vraiment radical et j’ai vécu plusieurs moments comme ça ici à CKUT… c’est vraiment difficile, mais ça vaut la peine. Des auditeurs m’appellent et continuent la conversation. C’est un point de vue différent. Selon moi, c’est ça le travail de la radio communautaire. Ça peut arriver en musique aussi, parce qu’on peut avoir le même genre de conversation. CF : Comment êtes-vous arrivé à CKUT? LB : J’ai été membre de différents groupes de musique, je faisais des choses à la radio de Concordia et je faisais des films… Quand j’ai commencé ici, j’ai regardé autour de moi et je me suis dit « De quoi a-t-on besoin? » et je crois que c’était une des meilleures choses à faire, au lieu de dire « Qu’est-ce que je peux tirer de cette opportunité? » CF : Comment la station a-t-elle changé et évolué depuis que vous êtes ici? LB : Je dirais sur le plan de la diversité des communautés, et le fait qu’on n’est plus seulement un groupe de gens du monde universitaire, en termes de mentalités, en termes des participants, ce n’est pas tout le monde qui a fait des études universitaires…Beaucoup de gens qui étaient ici ont changé. En passant, ce n’est pas facile la diversité. Être confronté à ça a amené plusieurs grincements de dents. C’est un défi. Et de temps en temps c’est déprimant. Parce qu’on voit à quel point les gens ont des préjugés et un instinct de préservation. Il y a tellement de choses qu’on n’avait pas prévues. On n’avait pas pensé des gens resteraient ici vingt-cinq ans. Surtout les programmateurs. J’imagine que je n’avais pas pensé que même moi je resterais. C’est comme, Quoi? Je suis ici encore? C’est une partie de ce que je suis. Ça vous nourrit. C’est dans votre sang. Il y a un programmateur qui dit que c’est sa thérapie. C’est difficile à croire, les programmateurs qui sont ici de quatre heures jusqu’à sept heures le matin, et ils le feront pour toujours. Ils viennent en pleine nuit, au milieu de l’hiver. C’est clair, c’est leur passion, c’est leur vie. Personne n’avait prévu ça, qu’ils avaient mis sur pied une station de radio et qu’il y avait des gens pour qui la radio deviendrait leur vie, y compris moi-même. Personne n’avait prévu ça. CF : Qu’elle est le rôle de CKUT dans l’art que vous créez et celui que vous aimez? LB : La liberté, c’est sûr! Et aussi, j’ai entendu tellement d’artistes que j’aime reconnaître la diversité dans leur travail. Les gens écoutent le travail d’autres musiciens et ça change tout. Les gens sont exposés à toute une variété de musiques. Et j’imagine que l’absence de formalité rend l’expérimentation plus facile. Le fait que nous utilisions souvent notre studio pour des performances en direct, que l’on s’assoit tous ensemble, et qu’on se dit « on pourrait faire un atelier circuit » ou quelqu’un dit souvent « J’ai une idée! ». Si on ne peut pas formuler ces idées, c’est difficile de les réaliser. Mais ici, c’est une place pour ces idées-là.